Taxes assises sur le chiffre d'affaires

 

 

Chapitre 5 :

Le régime des déductions en matière de TVA

 

(Version 2006)

 

Documentation obligatoire : Le code de la TVA

 

Sommaire :

 

Section 1. Modalités des déductions. 2

§ 1. Principe général 2

§ 2. Les fondements du régime de la déduction.. 2

§ 3. Les conditions de déductibilité de la TVA.. 2

§ 4. Biens et services ouvrant droit à déduction et biens et services exclus du droit à déduction   6

Section 2. Règles de déduction spécifiques aux entreprises partiellement assujetties. 7

§ 1. La règle de l’affectation.. 7

§ 2. La règle du prorata.. 7

§ 3. Règles de calcul du prorata.. 7

§ 4. Modalités de déduction pour les biens et services autres que les immobilisations amortissables  9

§ 5. Les échanges intersectoriels. 12

Section 3. Le reversement de la TVA initialement déduite.. 12

§ 1. Reversement total de la TVA initialement déduite.. 12

§ 2. Régime applicable à la cessation d’activités. 13

§ 3. La régularisation de la TVA sur les dons en nature.. 14

§ 4. Reversement partiel selon les modalités particulières sur les immobilisations amortissables  14

§ 4. Événements n’entraînant aucune régularisation.. 16

Section 4. Crédit de départ des entreprises nouvellement assujetties. 16

§ 1. Droit au crédit de départ 16

§ 2. Obligation de déposer l’inventaire des biens donnant lieu au crédit de départ 17

§ 3. Cas du nouvel assujetti partiel 17


Sont successivement étudiés :

- Les modalités de déduction (section 1) ;

- Les règles de déduction des entreprises partiellement assujetties (section 2) ;

- Le reversement de la TVA initialement déduite (section 3) ;

- La détermination du crédit de départ (section 4).

Section 1. Modalités des déductions

§ 1. Principe général

Aux termes de l’article 9 du code de la TVA, la taxe sur la valeur ajoutée qui a effectivement grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux opérations taxables ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée retenue à la source. La déduction de la TVA sur les acquisitions de biens et services est donc réservée aux assujettis pour les opérations imposables et assimilées qu’ils réalisent, alors que la TVA retenue à la source est systématiquement déductible.

La taxe récupérable est imputée globalement sur le montant de la taxe collectée sur les ventes.

Est déductible la taxe sur la valeur ajoutée ayant effectivement grevé les acquisitions locales de biens auprès d’assujettis, les livraisons à soi-même d’immobilisations corporelles, les importations ainsi que les services nécessaires pour les besoins de l’exploitation.

La déductibilité de la taxe facturée sur les achats de biens et services auprès d’autres assujettis est la règle et la non déductibilité la rare exception.

§ 2. Les fondements du régime de la déduction

Le système de déduction met en œuvre le principe de la neutralité de la TVA. Ainsi, ce n’est que lorsque la déduction joue pleinement et totalement que le produit se trouve finalement soumis de façon proportionnelle à son prix de vente selon le taux de TVA qui lui est applicable sans aucune rémanence.

C’est le système de déduction qui permet aussi d’assurer une transparence fiscale totale des produits exportés et qui évite que les produits nationaux ne soient handicapés par des taxes rémanentes face à la concurrence internationale.

La déduction généralisée assure enfin le respect de la règle «Non bis in idem» nécessaire à l’équité fiscale interdisant toute double imposition d’un même produit à un même impôt perçu au profit de la même collectivité.

§ 3. Les conditions de déductibilité de la TVA

On distinguera 4 types de conditions de déductibilité de la TVA :

A. La condition générale de l’assujettissement des intervenants.

B. Les conditions de fond.

C. Les conditions de forme.

D. Les conditions de temps.

A. Condition générale de l’assujettissement des intervenants :

La condition de l’assujettissement des intervenants est une condition préalable pour bénéficier de la déduction.

Ainsi, pour qu’il y ait droit à déduction, l’acquéreur et le vendeur doivent être des assujettis. Seuls les assujettis à la TVA peuvent récupérer la taxe sur la valeur ajoutée facturée sur leurs achats de biens et services effectués auprès d’autres assujettis.

Ne donnent aucun droit à déduction les acquisitions de produits exonérés, les acquisitions auprès des entreprises dont les activités se situent en dehors du champ d’application de la TVA, ainsi que les acquisitions auprès des personnes soumises selon le régime du forfait d’impôt BIC.

B. Conditions de fond :

Quatre conditions de fond régissent le droit à déduction :

- L’élément supportant la taxe doit concourir à une opération taxable ou assimilée ;

- L’élément ouvrant droit à déduction doit être nécessaire à l’exploitation ;

- L’élément ouvrant droit à déduction doit être acquis par l’entreprise ;

- L’élément ne doit pas être exclu du droit à déduction par la loi.

(1) L’élément supportant la taxe doit concourir à une opération taxable ou assimilée : Concourent à une opération taxable, les achats de biens et services utilisées pour réaliser :

- des opérations effectivement taxées ;

- des exportations y compris des produits exonérés pour lesquels l’entreprise a exercé son droit à l’option ;

- des ventes en suspension justifiées par une autorisation administrative de vente en suspension ;

- les produits exonérés en régime général ouvrent droit à déduction lorsqu’ils ont fait l’objet d’un assujettissement par option totale ou partielle en raison des exportations ou des ventes aux   assujettis ;

- et des opérations situées hors du champ territorial tunisien (c’est-à-dire dont le lieu d’imposition éventuelle se situe dans un pays étranger) réalisées par des assujettis établis en Tunisie ou à l’étranger. Dans ce cas, la TVA afférente à des acquisitions faites en Tunisie pour des travaux ou services destinés à l’étranger est concernée par le droit à déduction.

Les acquisitions utilisées par les biens exportés ouvrent droit à déduction y compris, sur option totale ou partielle, lorsque le bien exporté est exonéré de TVA en vente locale.

Se trouve, par conséquent, exclue du droit à déduction par destination, la TVA grevant les acquisitions d’emballages récupérables identifiables ou non identifiables donnés en consignation en raison du fait que la consignation et la vente pour non retour de ces emballages sont déclarées par le § 2 alinéa I de l’article 6 du code de la TVA hors d’assiette et donc non taxable à la vente.

Est aussi exclue du droit à déduction, la TVA supportée par erreur.

(2) L’élément doit être nécessaire à l’exploitation : Le caractère nécessaire à l’exploitation qui constitue une condition de fond pour la déductibilité de la TVA ayant grevé les acquisitions s’apprécie en fonction des circonstances de fait de chaque entreprise.

Néanmoins, faisant une interprétation libérale des conditions de déductibilité, l’administration a considéré que la TVA peut être récupérable en dépit du caractère non déductible de la dépense en matière d’impôt sur les bénéfices ([1]).

L’application de cette condition amène à exclure du droit à déduction la TVA qui grève les biens acquis pour les seuls besoins des dirigeants sociaux ou du personnel en dehors de tout rapport avec l’exploitation.

Parmi les exemples fournis par l’administration fiscale, les traitements suivants sont retenus :

- La TVA grevant les vêtements de travail ou de sécurité du personnel est récupérable ;

- En revanche, la TVA relative à un jardin d’enfants sur les lieux de travail n’est pas récupérable.

(3) L’élément ouvrant droit à déduction doit être acquis par l’entreprise : La règle est que les assujettis ne peuvent déduire que la TVA ayant grevé les biens dont ils sont propriétaires. Néanmoins, certaines catégories d’acquisitions, bien que n’octroyant pas de droit de propriété complète, donnent droit à déduction. Tel est le cas par exemple d’une construction sur terrain d’autrui dans le cadre d’un contrat de bail à construction ou en vertu d’un contrat d’occupation du domaine public ou même d’un bail ordinaire. Un autre exemple peut être donné par les travaux d’aménagement, d’agencement ou d’entretien et réparation sur un immeuble ou une machine loués.

Pour ces différentes catégories de travaux et d’acquisitions, la TVA est récupérable bien que l’entreprise ne dispose que d’un droit de jouissance et éventuellement de protection et non de propriété complète du bien.

(4) L’élément ne doit pas être exclu du droit à déduction par la loi : La loi n’exclut expressément du droit à déduction qu’une seule catégorie d’éléments par nature.

Il s’agit des voitures de tourisme ne faisant pas l’objet même de l’exploitation de l’entreprise et de toute dépense qui leur est rattachée. Ainsi, aux termes du paragraphe 1 de l’article 10 du code de la TVA, n’ouvre pas droit à déduction la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les voitures de tourisme servant au transport de personnes autres que celles objet de l’exploitation ainsi que la location de voitures de tourisme et tous frais engagés pour assurer leur marche et leur entretien.

Régime des voitures de tourisme objet de l’exploitation : La notion d’objet de l’exploitation recouvre les voitures de tourisme acquises en vue de la revente ou qui sont destinées à être données en location avec ou sans chauffeur, les voitures utilisées pour les entreprises de transport des personnes (louages, taxis et ambulances) ainsi qu'à notre avis les voitures d'apprentissage de la conduite des auto-écoles. Les taxes grevant ces voitures de tourisme ainsi que celles grevant les frais qui leurs sont rattachés sont récupérables des taxes collectées en raison du fait que ces voitures sont l’objet sur lequel porte l’activité de l’entreprise.

C. Conditions de forme :

Le bénéfice du droit à déduction est subordonné à la justification du paiement de la TVA par des pièces justificatives régulières et probantes à savoir :

- Une facture d’achat ;

- Les documents douaniers ;

- L’acquittement de la taxe sur les immobilisations produites par l’entreprise pour elle-même.

(1) Les factures d’achat : Seules les taxes figurant sur des factures régulières ouvrent droit à déduction. Les conditions de régularité des factures sont fixées par l’article 18 du code de la TVA.

Pour remplir les conditions fiscales, la facture doit comporter :

- l’identification de l’entreprise vendeuse et son adresse ;

- une numérotation de la facture ;

- le numéro de la carte d’identification fiscale d’assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée délivrée par l’administration fiscale au vendeur ;

- la date de l’opération ;

- la désignation de l’entreprise acheteuse et de son numéro d'identification fiscale ;

- la désignation du bien ou du service, des quantités et prix hors taxe ;

- les taux et les montants de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- Le montant net toutes taxes comprises.

Par ailleurs, et sans qu’elles ne constituent une condition de déductibilité de la TVA, les mentions suivantes doivent figurer sur les factures :

- Le numéro du registre de commerce de l’entreprise vendeuse ;

- Le capital social si le vendeur est une société.

Dans une prise de position (Bordereau du directeur général du contrôle fiscal n° 1521 du 3 mars 1998), l’administration a considéré que le défaut de mention du numéro d’assujetti du vendeur ne prive pas l’acquéreur de son droit à déduction, mais expose le vendeur à une amende. Cette prise de position est d’autant plus pertinente que l’administration est en mesure, grâce à une informatique performante, de vérifier si le fournisseur est véritablement assujetti.

Pour que la TVA soit déductible, il faut que la facture justificative ou le document en tenant lieu soit établi au nom de l’entreprise. Néanmoins, le cas particulier de marché, bien que le maître de l’ouvrage achète en son nom tout ou partie des fournitures, objet du marché, la TVA est récupérable chez l'entrepreneur qui supporte le coût desdits approvisionnements.

(2) Les importations : Les documents douaniers et leurs annexes font foi pour la déduction de la TVA acquittée aussi bien au titre du bien importé que des services liés à l’importation même si les pièces justificatives relatives aux services liés à l’importation sont établies au nom du transitaire agissant pour le compte de l’entreprise et refacturés par lui en tant que débours.

(3) Cas particulier des marchés comportant fournitures et travaux (article 9-I-1, alinéa 4 du code de la TVA) : Lorsque deux entreprises sont liées par un contrat pour la réalisation d’un marché comportant fournitures et travaux et que le maître de l’ouvrage (le client qui est le propriétaire) importe ou achète localement en son nom tout ou partie des fournitures prévues dans le contrat, la TVA réglée ouvre droit à déduction au profit de l’entrepreneur qui a réalisé l’ouvrage (maître d’œuvre : fournisseur).

Lorsque la fourniture ainsi faite bénéficie de la suspension de la taxe, sa valeur est rétrocédée au maître de l’ouvrage en détaxe.

(4) Les livraisons à soi-même : La justification de la déduction de la TVA sur une livraison à soi-même d’une immobilisation corporelle est fournie par la TVA acquittée par l’entreprise elle-même figurant sur les déclarations propres de l’entreprise.

(5) Les avoirs sur achats : Les avoirs sur achats pour quelque motif que ce soit donnent lieu à reversement de la TVA initialement déduite, généralement, sous la forme d’une imputation sur la TVA récupérable de la période. La TVA grevant les avoirs sur achats vient, par conséquent, en réduction de la TVA récupérable de la période au cours de laquelle l’entreprise a reçu ledit avoir sur achat.

D. Conditions de temps :

Les conditions de temps ont trait à :

- la naissance du droit à déduction ;

- la date d’imputation de la taxe déductible ;

- et l’étendue de la période pendant laquelle la correction des erreurs reste possible.

(1) La naissance du droit à déduction : En raison de l’existence d’une certaine confusion dans le code de la TVA entre la notion de fait générateur et la notion d’exigibilité de la TVA, il est possible de considérer que la TVA devient récupérable chez l’entreprise qui l’a supportée lorsqu’elle est facturée par le vendeur, qu’elle soit exigible ou non chez ce dernier.

Ainsi, lorsqu'une entreprise paie des acomptes ou avances sur la rémunération d’un service, la TVA exigible chez son fournisseur de services au titre de ces avances est immédiatement récupérable chez elle. Dans un autre cas, lorsqu’une entreprise nationale reçoit une facture d’achat dont le montant est égal ou supérieur à 1000 D TTC, la TVA qui lui est facturée est immédiatement récupérable alors qu’elle ne sera exigible chez le vendeur que lorsque ladite facture lui aura été payée.

À l’importation, les taxes payées par obligation cautionnée sont déductibles immédiatement et il n’y a pas lieu d’attendre la date de l’échéance de l’obligation pour l’exercice du droit à déduction.

Ainsi, le droit à déduction est acquis lorsque :

- le fait générateur de la taxe s’est produit,

- l’entreprise est en possession d’une facture justificative ou d’un document en tenant lieu répondant aux conditions de forme requises,

- l’opération d’achat remplit les conditions de fond requises pour la déduction.

(2) La date d’imputation de la taxe déductible : qu’il s’agisse de biens, de services ou d’immobilisations, la TVA est toujours déductible au titre du mois même au cours duquel a pris naissance le droit à déduction.

(3) L’étendue de la période pendant laquelle la correction des erreurs reste possible : Le droit de reprise étant mutuel et réciproque, le contrôle des impôts peut procéder au redressement de l’entreprise dans la limite du délai de prescription mais l’entreprise dispose aussi, de son côté à sa propre initiative, du droit de reprendre ses erreurs et de récupérer la TVA omise en remontant à la limite de la date du délai de prescription.

Le délai de prescription s’étend jusqu’à l’expiration de la quatrième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due. Il porte ainsi sur 4 ans et quelques mois (de 1 mois à 12 mois) de l’année en cours (article 19, CDPF).

Ainsi, en novembre N, on peut remonter jusqu’au 1er janvier N-4. En revanche, à partir du 1er janvier N+1, on ne pourra plus remonter que jusqu’au 1er janvier N-3.

§ 4. Biens et services ouvrant droit à déduction et biens et services exclus du droit à déduction

(1) TVA déductible : En règle générale, toute TVA remplissant les conditions générales de déduction, les conditions de fond, de forme et de délai, à l'exception des cas limitatifs de non déduction, est déductible.

Ainsi, est déductible la TVA ayant grevé :

- Les investissements de toutes sortes nécessaires à l’exploitation à l’exception des voitures de tourisme destinées au transport des personnes et ne constituant pas l’objet même de l’exploitation et à l’exception aussi des emballages récupérables et identifiables destinés à la consignation et non donnés en location ;

- Les achats de matières, marchandises et services nécessaires à l’exploitation ;

- Les frais généraux de toutes sortes nécessaires à l’exploitation à l’exception des services liés aux voitures de tourisme.

(2) TVA non déductible : Le droit fiscal tunisien contient 6 exclusions du droit à déduction en matière de TVA :

1. Les biens et services non utilisés pour les besoins de l’exploitation.

2. Les voitures de tourisme servant au transport de personnes autres que celles objet de l’exploitation ainsi que la location de voitures de tourisme et tous frais engagés pour assurer leur marche et leur entretien.

3. Les biens et services acquis auprès des forfaitaires. Toutefois, pour les commerçants assujettis à la TVA, la taxe sur la valeur ajoutée est liquidée sur la différence entre le prix de vente et le prix d’achat pour les produits acquis auprès des forfaitaires.

4. Les achats effectués auprès des non assujettis.

5. Les emballages destinés à être donnés en consignation qui sont exclus à la fois de l’assiette imposable et du droit à déduction.

6. La TVA facturée à l’entreprise à tort (par erreur).

(3) Régime spécifique relatif à la TVA payée avec la taxe unique des transports routiers : Aux termes du paragraphe II de l’article 17 du code de la TVA, est perçue dans les mêmes conditions que la taxe unique de compensation des transports routiers, une TVA forfaitaire applicable aux véhicules de transport selon le tarif suivant :

- Transport public ou privé de marchandises : 1 dinar par tonne de charge utile et par mois ;

- Autre transport public ou privé de personnes : 1 dinar par place assise offerte et par mois.

Le forfait de TVA ainsi payé avec la taxe unique de compensation des transports routiers constitue une TVA récupérable pour les entreprises assujetties.

Section 2. Règles de déduction spécifiques aux entreprises partiellement assujetties

Les entreprises partiellement assujetties sont des entreprises qui regroupent à la fois des activités assujetties à la TVA et des activités exonérées relevant du tableau A ou se situant en dehors du champ d’application de la TVA.

Ces entreprises ne peuvent déduire l’intégralité de la TVA ayant grevé l’ensemble de leurs achats de biens et services. Pour déterminer le sort de chaque TVA subie en amont, il y a lieu d’appliquer la règle de l’affectation.

§ 1. La règle de l’affectation

Cette règle amène, après avoir divisé l’entreprise en secteurs d’activités distincts, à déterminer pour chaque achat de bien et de service si son affectation est exclusive à un secteur ou si elle est mixte aux deux secteurs.

Ainsi, la règle de l’affectation, qui favorise le principe de neutralité de la TVA, amène à considérer qu’une entreprise partiellement assujettie utilise selon le cas des biens et services :

- affectés exclusivement à un secteur soumis et pour lesquels elle bénéficie de la déduction totale, sauf les exclusions légales,

- affectés exclusivement à un secteur non soumis et pour lesquels elle ne bénéficie d’aucun droit à déduction,

- affectés d’une façon commune au secteur soumis et au secteur non soumis, pour lesquels elle ne bénéficie que de la déduction d’une partie de la taxe déterminée selon la règle du prorata.

§ 2. La règle du prorata

La règle du prorata de déduction applicable à la TVA grevant les achats de biens y compris les investissements et les services utilisés communément par les deux secteurs de l’entreprise (à savoir le secteur soumis et le secteur qui ne l’est pas) fait que l’entreprise ne déduit que la quote-part de TVA correspondant aux activités soumises selon le pourcentage des activités soumises et assimilées par rapport à l’ensemble des activités de l’entreprise. Ce pourcentage est dit le prorata.

Ce prorata est à la fois général et unique. Il est général, parce que, sauf exception, l’ensemble des recettes réalisées par l’entreprise concourent à sa détermination. Il est unique parce que toute l’entreprise ne peut utiliser qu’un seul prorata par an.

Le pourcentage général de déduction applicable à une année civile est dégagé d’après les opérations réalisées au cours de l’année civile précédente ou selon les comptes prévisionnels en cas d’entreprise nouvellement installée ou nouvellement assujettie. Il est déterminé au début de l’année pendant laquelle il est utilisé. Ainsi, le prorata à utiliser pour la déduction des taxes communes grevant les biens et services acquis par une entreprise partiellement assujettie en N est celui dégagé début N à partir des données de N-1.

Néanmoins, si pour les biens autres que les immobilisations amortissables ainsi que les services la déduction opérée selon le prorata est définitive, la récupération initiale relative aux immobilisations amortissables est susceptible d’être modifiée à la fin de l’année d’acquisition du bien si le prorata de déduction varie de plus ou moins plus de 5%.

§ 3. Règles de calcul du prorata

Le prorata d’une année résulte du rapport entre les recettes des ventes soumises locales, à l’exportation ou en suspension de taxes et les recettes provenant des opérations de transport aérien international irrégulier et l’ensemble des recettes réalisées. Les deux éléments du rapport étant ceux réalisés pendant l’exercice civil écoulé ou la partie de l’exercice civil écoulé.

Selon la Direction des Impôts, l’emploi du terme «recettes» par le code de la TVA vise le chiffre d’affaires réalisé avec les tiers, ce qui exclut :

- les livraisons à soi-même, même taxées ;

- les sommes reçues en consignation d’emballages qui constituent des dépôts non acquis à l’entreprise. Ces sommes ne sont pas prises en considération même en cas de non retour ;

- les débours (remboursements de frais non imposables) ;

- les cessions d’éléments d’actif soumis à un régime spécifique de régularisation de TVA ;

- les affaires réalisées en dehors du champ territorial tunisien ;

- les indemnités d’assurance ;

- les facturations complémentaires ou rectificatives ne se rattachant pas à l’année concernée par le calcul du prorata (complément de prix, rabais, ristournes...).

Compte tenu de ce qui précède, le calcul du prorata prend en compte :

AU NUMÉRATEUR :

- les ventes soumises à la taxe sur la valeur ajoutée tenant compte de la date d’exigibilité (toutes taxes comprises),

- les ventes réalisées à l’exportation de produits ou de services taxables en droit ou par option (taxe sur la valeur ajoutée fictive comprise) ;

- les ventes assimilées à des exportations (taxe sur la valeur ajoutée fictive comprise) ;

- les ventes réalisées en suspension de taxe sur la valeur ajoutée (taxe sur la valeur ajoutée fictive comprise) ;

- les ventes de déchets (taxe sur la valeur ajoutée comprise).

AU DÉNOMINATEUR :

- les montants figurant au numérateur (toutes taxes comprises) ;

- les ventes portant sur des affaires exonérées pour lesquelles aucune option n’est possible ou lorsqu’une telle option est possible aucune option n’a été exercée ;

- les ventes situées hors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Le régime de la suspension de taxe doit être nettement distingué de celui de l’exonération. En effet, dans le régime de la suspension, l’exigibilité de la taxe normalement due peut être éventuellement réclamée à un stade ultérieur, tandis que dans l’exonération, la taxe n’est pas et ne sera jamais exigible. L’exonération constitue un statut donné au produit de part sa nature ([2]) en vertu de la loi (Produit figurant sur une liste énumérée au tableau A annexé au code de la TVA). La suspension est un régime de faveur, un régime d’avantage octroyé à une vente d’un produit normalement taxable mais pour lequel l’administration autorise la suspension de la TVA en raison de sa destination.

En conséquence, les opérations faites en suspension donnent droit à la déduction dans les mêmes conditions que celles soumises alors que celles faites en exonération (Tableau A) ou situées en dehors du champ d’application de la TVA n’en donnent pas droit. C’est d’ailleurs, pour cette raison que les ventes en suspension figurent dans les deux termes du rapport majorées du montant de la taxe suspendue, alors que les ventes exonérées ainsi que celles situées en dehors du champ d’application de la TVA ne figurent qu’au dénominateur.

Les ventes à prendre en considération pour la détermination du prorata sont les ventes effectivement réalisées durant l’année de référence en tenant compte du fait que l’exigibilité de la taxe est située à la date de la réalisation de l’affaire ou à la date de l’encaissement. C’est ainsi, par exemple, qu’en ce qui concerne la détermination du prorata des entreprises de travaux publics ainsi que celles qui réalisent des opérations dont le montant est égal ou supérieur à 1000 D TTC conclues avec l’État, les collectivités locales, les entreprises et établissements publics, leurs recettes réalisées sont constituées par celles taxables au cours de l’année considérée, c’est-à-dire :

- celles encaissées lorsqu’elles concernent des opérations dont le montant est égal ou supérieur à 1000 D TTC conclues avec l’État, les collectivités publiques locales, les établissements et entreprises publics ;

- et celles exigibles sur les débits pour le compte d’autres personnes.

Si les ventes de produits exonérés ou situés en dehors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée sont considérées, pour la détermination du prorata, pour leur montant réel, celles réalisées à l’exportation ou en suspension de taxes sont majorées de la taxe fictive non perçue à leur réalisation. C’est ainsi que ces ventes sont majorées de 6%, 10%, 18% ou 29% de leur montant selon que l’un ou l’autre de ces taux leur aurait été appliqué si elles avaient été réalisées en régime intérieur.

Les chiffres pris en compte pour le calcul du prorata incluent, éventuellement, le Fodec.

Formule de calcul du prorata : Le prorata de déduction se calcule, à l’année civile, selon la formule suivante :

(A + B + C + D + E) x 100 / (CA global + F + G + H)

où A = Chiffre d’affaires ou recettes taxables de l’année, en tenant compte du fait générateur et de la date d’exigibilité pour son montant TTC ;

B = Montant réel des exportations ;

C = Taxe fictive sur exportations ;

D = Ventes en suspension de taxes ;

E = Taxe non exigée sur ventes en suspension ;

F = Ventes exonérées de taxe y compris à l’exportation sans option ;

G = Ventes de produits hors du champ d’application de la TVA ;

H = Subventions reçues pour insuffisance de prix.

Ce pourcentage ainsi déterminé est retenu avec deux chiffres après la virgule.

§ 4. Modalités de déduction pour les biens et services autres que les immobilisations amortissables

La taxe sur les biens et services communs utilisés dans les deux secteurs soumis et non soumis est déduite au fur et à mesure de leur acquisition dans la limite du prorata établi en début d’année sur la base des chiffres de l’exercice précédent. Une telle déduction est définitive puisque la révision de la déduction faite selon la règle du prorata n’est prévue que pour les biens soumis à amortissement.

A. Modalités de déduction pour les biens amortissables

En ce qui concerne les biens amortissables, les entreprises qui ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de l’ensemble de leurs activités ont la possibilité de déduire une fraction correspondant au prorata de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les immobilisations communes utilisées par les deux secteurs. Le prorata de déduction applicable à cette déduction initiale est celui calculé au titre de l’exercice précédent.

Il est ensuite régularisé, une seule fois, sur la base du prorata définitif de l’année d’acquisition s’il dégage une variation en plus ou moins supérieure à 5% par rapport au prorata utilisé pour la déduction initiale.

B. Régularisation de la déduction initiale sur les biens soumis à amortissement commun aux deux secteurs

a) Principe de la régularisation : En cas de variation de plus ou moins plus de cinq centièmes du prorata appliqué (5,01 en plus ou en moins) par rapport au prorata de l’année où la déduction a pris naissance, des corrections doivent être apportées à la déduction initiale.

Cette régularisation est opérée, une seule fois, sur la base de la variation du prorata au cours de l’année d’acquisition, au titre de la déclaration du mois de janvier de l’année suivant celle au cours de laquelle la déduction initiale est opérée.

b) Forme de la régularisation : Si le prorata de l’année pendant laquelle le droit à déduction a pris naissance est supérieur de plus de cinq centièmes au prorata ayant servi à la déduction initiale, un complément de déduction sur immobilisations est alors accordé à l’entreprise dans une proportion égale à la différence du prorata de fin d’année et de celui de début de l’année.

À titre d’exemple, si le pourcentage ayant servi à la déduction initiale est de 85% alors que celui de fin d’année est de 94%, la variation est de : 94% - 85% = 9% > 5%, l’entreprise est alors autorisée à déduire un complément de 9% de la taxe ayant grevé les immobilisations, communes aux deux secteurs, acquises au cours de l’exercice.

En revanche, si le prorata de l’année pendant laquelle le droit à déduction a pris naissance est inférieur de plus de cinq centièmes au prorata ayant servi pour la déduction initiale, l’entreprise est tenue de reverser au trésor une partie de la taxe initialement déduite dans une proportion égale à la différence du prorata du début de l’année et de celui de fin d’année.

Ainsi, si le pourcentage ayant servi à la déduction initiale est de 85% alors que celui de fin d’année n’est que de 70%, la variation est de : 70% - 85% = -15 % < -5%, l’entreprise doit reverser la déduction opérée en trop qui est de 15% de la taxe ayant grevé les immobilisations, communes aux deux secteurs, acquises au cours de l’exercice.

Enfin, si le prorata de l’année pendant laquelle le droit à déduction a pris naissance est inférieur ou supérieur de cinq centièmes et moins, aucune régularisation n’est à faire, la taxe déduite initialement devient définitive.

Exemple de calcul du prorata

Une entreprise de fabrication de machines réalise en N-1 les opérations suivantes :

- ventes locales toutes taxes comprises

600.000

- ventes à l’exportation (taux de TVA : 18%) 

100.000

- ventes à l’exportation (exonérées) sans option

100.000

- ventes en suspension (taux de TVA : 18%) 

160.000

- ventes locales en exonération 

170.860

Son prorata N (calculé à fin décembre N-1) qui lui servira pour la déduction de la taxe supportée au titre de tous biens ou services à usage commun ou mixte sera déterminé comme suit :

AU NUMÉRATEUR :               

- ventes locales toutes taxes comprises

600.000

- ventes à l’exportation (taux de TVA : 18%)

100.000

- taxe sur ventes à l’exportation

18.000

- ventes en suspension (taux de TVA : 18%)

160.000

- taxe sur ventes en suspension

28.800

TOTAL

906.800

AU DÉNOMINATEUR :            

- montant du numérateur

906.800

- ventes en exonération

270.860

TOTAL

1.177.660

Calcul du prorata applicable à l’exercice N : 906.800 / 1.177.660 = 77%.

Exemple de déduction initiale

Supposons que l’entreprise ci-dessus achète en N des biens et services communs aux deux secteurs soumis et exonérés. L’achat porte sur :

- des biens amortissables ayant supporté une TVA de 20.000 ;

- et des biens non amortissables et des services taxés ayant supporté une TVA de 10.000.

Le pourcentage de déduction opéré en N est le suivant :

- au titre des biens amortissables : 77%.

- au titre des autres biens et services : 77%.

Si la déduction ainsi opérée au titre des biens non amortissables et des services est définitive, celle opérée au titre des biens amortissables est sujette à régularisation à la fin N.

Hypothèses de variation :

1ère hypothèse : 

Le pourcentage déterminé à partir des opérations réalisées en N devient 92%. La variation du pourcentage initial est de : 92% - 77% = 15%.

Cette variation en hausse excède le seuil de 5%, l’entreprise peut donc opérer une déduction supplémentaire de 15% de la taxe ayant grevé l’immobilisation, soit une déduction supplémentaire   de : 20.000 x 15% = 3.000

La déduction complémentaire est effectuée au mois de janvier N+1 (déclaration déposée en février N+1) (article 9 § III point 2 du code de la TVA).

2ème hypothèse :

Le pourcentage déterminé à partir des opérations réalisées en N devient 70%. La variation du pourcentage initial est de : 70% - 77 % = - 7%.

Cette variation en baisse excède le seuil de 5%, l’entreprise doit opérer un reversement de la déduction opérée en reversant 7% de la taxe ayant grevé l’immobilisation.

Le reversement à effectuer au mois de janvier N+1 dans le cadre de la déclaration à déposer en février N+1 est égal à : 1.400 soit 20.000 x 7%.

3ème hypothèse :

Le pourcentage déterminé à partir des opérations réalisées en N devient 80%. La variation du pourcentage initial est de : 80% - 77% = + 3%.

Cette variation à la hausse n’excède pas le seuil de 5%, l’entreprise n’a aucune déduction supplémentaire à opérer, la déduction initiale étant considérée comme définitive.

4ème hypothèse :

Le pourcentage déterminé à partir des opérations réalisées en N devient 74%. La variation du pourcentage initial est de : 74% - 77% = - 3%.

La variation étant inférieure à 5%, aucune régularisation n’est à effectuer.

Étude des différentes hypothèses :

Reprenons l’exemple ci-dessus, le prorata sera déterminé différemment selon que l’entreprise ait ou non opté pour l’assujettissement des produits exonérés à l’exportation et éventuellement pour l’assujettissement des produits exonérés vendus aux assujettis ou l’assujettissement total des produits exonérés puisqu’elle exporte ces produits.

Hypothèse : Sans option

Le prorata est de :

[(600.000 D + 118.000 D + 188.800 D) x 100] / (906.800 D + 270.860 D) =  77,00%.

Hypothèse : Option à l’assujettissement partiel des produits exonérés exportés

Le prorata est de :

[(600.000 D + 236.000 D + 188.800 D) x 100] / (1.024.800 D + 170.860 D) =  85,71%.

Hypothèse : Option pour l’assujettissement total des produits exonérés.

L’entreprise devient totalement assujettie, le prorata est de 100%.

§ 5. Les échanges intersectoriels

(1) Livraison à soi-même du secteur assujetti au secteur non assujetti : Ces ventes constituent une livraison à soi-même de biens (Travaux faits par l’entreprise pour elle-même au sens fiscal ou cessions internes). Elles sont assujetties à la TVA dans le secteur assujetti. Cette TVA est assise sur le prix de vente hors TVA pratiqué pour des biens similaires ou à défaut, par le prix de revient déterminé au moment de la réalisation du fait générateur.  Ce dernier est réalisé par l’utilisation du bien.

(2) Changement d’affectation : Lorsqu’un bien affecté initialement au secteur taxable et ayant par conséquent donné lieu à déduction est utilisé par le secteur non taxable, la TVA qui a fait l’objet d’une déduction doit donner lieu à un reversement :

- Correspondant à la taxe initialement déduite pour les biens et services autres que les immobilisations amortissables ;

- Selon les modalités propres au reversement de la TVA sur cession d’immobilisations amortissables.

Dans un autre sens, lorsqu’un bien est transféré du secteur non assujetti au secteur assujetti, ce transfert donne naissance à un droit à déduction selon les règles de fractionnement applicables aux immobilisations.

Section 3. Le reversement de la TVA initialement déduite

Bien qu’en règle générale, la TVA récupérable ait un caractère définitif, la survenance de certains événements entraîne une obligation de reverser la TVA initialement déduite en totalité ou en partie.

§ 1. Reversement total de la TVA initialement déduite

La TVA initialement déduite sur les marchandises et les biens autres que les immobilisations amortissables est reversée dans son intégralité à la survenance de l’un des événements suivants :

- Disparition injustifiée ;

- Changement d’affectation d’un secteur assujetti à un secteur non assujetti ou un emploi n’ouvrant pas droit à déduction ;

- Perte ou abandon de la qualité d’assujetti ;

- Apport en société de marchandises, de stocks et d’immobilisations ;

- Cession d’une immobilisation corporelle non amortissable (un bien).

(1) Disparition injustifiée : La disparition est injustifiée à chaque fois que le contribuable n’est pas en mesure d’apporter la preuve de la destination réelle (enlèvement frauduleux ou destruction fortuite ou délibérée) du bien disparu. Par conséquent, ne constituent pas des disparitions injustifiées et n’exigent de ce fait aucun reversement de la TVA initialement déduite les cas dûment prouvés de vol, d’inondation, d’incendie, de détournement ou de destruction volontaire.

La TVA à reverser en cas de disparition injustifiée est assise sur le coût de revient des biens disparus. Elle est exigible dans le cadre de la déclaration déposée au mois de janvier de l’année qui suit l’année où est constatée la disparition du bien (§ IV - point 1, article 9 du code de la TVA).

(2) Changement d’affectation : Lorsqu’un bien initialement destiné à une opération imposable donnant lieu à déduction est utilisé pour la réalisation exclusive d’autres opérations n’ouvrant pas droit à déduction, il y a un changement d’affectation qui entraîne le reversement de la taxe initialement déduite. Le reversement de TVA doit être effectué au titre du mois au cours duquel le changement d’affectation s’est produit (§ IV - point 2, article 9 du code de la TVA).

(3) Perte ou abandon de la qualité d’assujetti : La perte de la qualité d’assujetti résulte d’un changement de législation qui reclasse un produit précédemment imposable parmi les produits exonérés alors que l’abandon de la qualité d’assujetti résulte de la dénonciation d’une option à l’assujettissement à la TVA dans les délais réglementaires à savoir dans le délai de trois mois avant l’expiration de la période d’option expirant le 31 décembre de la quatrième année qui suit celle au cours de laquelle l’option a pris effet.

L’abandon de la qualité d’assujetti entraîne (article 2-I-3 § 6 du code de la TVA) :

- Le reversement de la TVA récupérée sur les produits existant en stocks achetés localement ;

- Le paiement de la TVA récupérée sur les produits existant en stocks importés sur une base majorée de 25% ;

- Le reversement des fractions de TVA sur les immobilisations selon les modalités propres  à cette catégorie de biens.

Ces reversements de TVA doivent être effectués au titre du mois au cours duquel l’abandon du statut d’assujetti s’est produit.

La perte de la qualité d’assujetti pour un produit entraîne :

- le reversement des taxes récupérées sur les stocks existants ;

- et le reversement des fractions éventuelles de TVA sur les immobilisations affectées exclusivement à l’activité exonérée.

(4) Apport (en nature) en société de marchandises, de stocks et d’immobilisations : Qu’il soit pur et simple ou à titre onéreux, l’apport de marchandises et de stocks en société, autre que dans le cadre d’une fusion, doit être traité comme une livraison imposable à la TVA et non comme une opération donnant lieu à reversement de la TVA initialement déduite. La taxe facturée au titre de l’apport en nature doit figurer sur un document tenant lieu de facture et portant toutes les mentions et particulièrement le code assujetti de l’apporteur. Ce document peut être le document constatant l’apport appuyé d’un état remplissant toutes les mentions d’une facture.

En revanche, l’apport d’immobilisations amortissables donne lieu à une régularisation chez l’apporteur déterminée selon les règles spécifiques aux immobilisations amortissables.

(5) Cession d’une immobilisation corporelle non amortissable : Si ladite immobilisation (un bien) a donné lieu à déduction de TVA, sa cession entraîne, à notre avis, le reversement de l’intégralité de la TVA initialement déduite. Néanmoins, l'administration a considéré que la cession d'un terrain immobilisé est régie par la règle de fractionnement par dixième.

§ 2. Régime applicable à la cessation d’activités

La réalisation de biens autres que les immobilisations dans le cadre d’une liquidation des activités est soumise à la TVA en tant que vente sur la base du prix de cession hors TVA alors que la cession d’immobilisations amortissables dans le cadre d’une liquidation des activités donne lieu à une régularisation selon les règles de régularisation spécifiques aux immobilisations.

§ 3. La régularisation de la TVA sur les dons en nature

Les assujettis à la TVA sont tenus de payer le montant de la taxe sur la valeur ajoutée supportée par les dons en nature accordés à L'Union Tunisienne de Solidarité Sociale, pour ce qui dépasse la limite de 1% du chiffre d'affaires annuel hors TVA ou à d'autres associations. Dans ce cas, la TVA est liquidée sur la base du prix de revient hors TVA et en appliquant le taux de la TVA afférent au produit objet du don.

Toutefois, pour les dons en nature accordés par les assujettis à des bénéficiaires autres que l'Union Tunisienne de Solidarité Sociale ou les autres associations créées dans le cadre de la loi n° 59-154 du 7 novembre 1959 relative aux associations, la TVA s'applique sur la base du prix de vente et en appliquant le taux de la taxe en vigueur.

§ 4. Reversement partiel selon les modalités particulières sur les immobilisations amortissables

La TVA initialement déduite au titre d’une immobilisation amortissable est partiellement reversée selon un système de fractionnement à la survenance de l’un des événements suivants :

- cession de l’immobilisation ;

- apport en société (autre que dans le cas d’une fusion ou d’une concentration) ;

- disparition injustifiée ;

- changement d’affectation ;

- cessation de l’activité ;

- perte ou abandon de la qualité d’assujetti.

Aux termes du paragraphe IV-2 de l’article 9 du code de la TVA, à la survenance de l’un des événements entraînant un reversement de la TVA, le montant à reverser est égal au montant de la taxe déduite ou celle  qui aurait dû être payée (dans l’hypothèse où le bien est acquis sous le régime suspensif), diminué d’un cinquième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de biens d’équipement ou de matériel, ou d’un dixième par année civile ou fraction d’année civile de détention s’il s’agit de bâtiment. Ainsi, le montant de la TVA à reverser est déterminé en déconnexion totale du prix de cession de l’immobilisation.

a) Immobilisations concernées par la régularisation : 

Aux termes du point 2 du § IV de l’article 9 du code de la TVA, le reversement éventuel des fractions de TVA concerne :

1- Les biens d’équipement et le matériel (selon un découpage en 5 fractions, décomptées chacune par année civile ou fraction d’année civile de détention).

2- Les bâtiments (selon un découpage en 10 fractions, décomptées chacune par année civile ou fraction d’année civile de détention).

Ainsi, n’est pas, à notre avis, concernée par le système de reversement applicable aux immobilisations amortissables, la cession d’un terrain, porté en immobilisations, acquis auprès d’un lotisseur et ayant donné lieu à la déduction de la TVA payée lors de l’acquisition. Cette opération entraîne le reversement de la totalité de la TVA initialement déduite au titre dudit terrain quel que soit son prix de cession. Néanmoins, la doctrine administrative assimile les terrains aux constructions et les soumet au reversement selon la règle du fractionnement.

b) Régime applicable aux constructions : 

Un reversement est dû lorsque l’un des événements entraînant ce reversement intervient selon le cas dans l’intervalle de la période allant de 9 ans plus une fraction d’année (lorsqu’il est acquis le 1er janvier) ou 8 ans plus deux fractions d’années qui suivent la date d’acquisition de la construction. La fraction d’année s’étend de 1 à 365 jours de l’année civile.

Ainsi, dans le cas d’une construction acquise le 31 décembre N et ayant donné lieu à une déduction de 100.000 dinars, cette construction se trouve affranchie de tout reversement de TVA si elle est cédée à partir du 1er janvier N+9.

En revanche, si elle est cédée courant N+8, elle donne lieu à un reversement de 1/10 de la taxe déduite soit 10.000 D.

Pour une construction acquise en octobre N, ayant donné lieu à une déduction de 50.000 D de TVA, tout événement déclenchant une obligation de reversement de TVA intervenant en janvier N+5 entraîne le décompte suivant :

Fractions de TVA définitivement acquises : Cumul des fractions définitivement acquises à l’entreprise

fraction d’année N

1/10

5.000

année N+1

2/10

10.000

année N+2

3/10

15.000

année N+3

4/10

20.000

année N+4

5/10

25.000

fraction d’année N+5

6/10

30.000

Fractions de TVA à reverser : 4/10 soit un montant de TVA à reverser de 20.000 D.

c) Régime applicable aux autres immobilisations amortissables : 

Un reversement est dû lorsque l’un des événements entraînant ce reversement intervient selon le cas dans l’intervalle de la période allant de 4 ans plus une fraction d’année ou 3 ans plus deux fractions d’année qui suivent la date d’acquisition de l’immobilisation.

Ainsi, un matériel acquis courant décembre N ne nécessite aucun reversement de TVA s’il est cédé après le 31 décembre N+3 soit à partir du 1er janvier N+4.

Pour une immobilisation (autre qu’un immeuble) acquise le 15 décembre N, et qui a donné lieu à une déduction de 5.000 dinars de TVA, tout événement déclenchant une obligation de reversement de TVA intervenant en janvier N+2, entraîne le décompte suivant :

Fractions de TVA définitivement acquises : Cumul des fractions définitivement acquises à l’entreprise

fraction d’année N

1/5

1.000

année N+1

2/5

2.000

fraction d’année N+2

3/5

3.000

Fractions de TVA à reverser : 2/5 soit un montant de TVA à reverser de 2.000 D.

d) Modalités de facturation de la TVA reversée sur immobilisations :

La TVA reversée est déterminée abstraction faite du montant de la transaction. Cette TVA est généralement incluse dans le prix de vente. Dans une telle hypothèse, elle est mentionnée en marge de la facture ou du contrat de cession (§ IV - point 3, article 9 du code de la TVA).

Exemple : Prix de cession : 60.000 dinars (dont TVA reversée sur immobilisation : 2.000 dinars).

e) Caractère déductible de la TVA reversée chez le nouvel acquéreur : 

L’acquéreur peut, s’il est assujetti, récupérer dans les conditions ordinaires la TVA reversée par le cédant ou l’apporteur à la seule condition que cette TVA soit mentionnée sur la facture de vente ou le contrat d’apport.

La question se pose, dans le cas où la TVA reversée par le vendeur de l’immobilisation tient compte de son prorata de déduction, si l’acquéreur acquiert un droit à déduction sur la base de la TVA effectivement reversée ou sur la base d’un calcul de régularisation prenant en compte la TVA ayant grevé l’immobilisation lors de son acquisition par le cédant ?

Illustrons la question par un exemple : La société A achète le 31/12/N une machine pour un prix hors TVA de 100.000 D grevé d’une TVA de 10%. Son prorata est de 50%. La machine est cédée le 1er janvier N+2.

TVA à reverser :

Calcul de la régularisation sur la base de la TVA ayant grevé l’immobilisation : 10.000 D x (2/5) = 4.000 D.

Bien que la doctrine ne se soit jamais prononcée sur la question, c’est le montant de la régularisation calculé sur la base de la TVA ayant grevé le bien qui devrait être récupérable chez l’acquéreur. Cette interprétation, conforme à l’esprit d’équité, n’est pas incompatible avec le texte formulé au point 3 du § IV de l’article 9 du code de la TVA.

Dans les usages pratiques, l’acquéreur se limite à récupérer la TVA effectivement reversée par le vendeur soit selon l'exemple ci-dessous 2.000 D.

Le nouvel acquéreur assujetti procède à la déduction selon les règles qui lui sont propres. Il est tenu de procéder au reversement de la taxe ainsi déduite en cas de survenance d’un événement déclenchant l’obligation de procéder au reversement au cours de la nouvelle période (de 10 ou 5 années ou fractions d’années selon la nature de l’immobilisation) couverte par cette obligation.

§ 4. Événements n’entraînant aucune régularisation

La transmission des stocks et immobilisations dans le cadre d’une concentration ou d’une fusion n’entraîne aucune régularisation chez la ou les entreprises absorbées.

La société absorbante ou la société nouvelle se substitue purement et simplement à la société absorbée au regard de la TVA. Ainsi, tout crédit de TVA chez la société absorbée est transféré comme une créance sur le trésor à la société absorbante.

Ainsi, si la société absorbante ou la société nouvelle cède l’immobilisation reçue dans le cadre de la fusion, elle procède au reversement éventuellement dû de la TVA selon les fractionnements calculés comme depuis la date d’acquisition de l’immobilisation chez l’absorbée.

Les mêmes règles s’appliquent en cas de transformation de la forme juridique de l’entreprise.

Enfin, en cas de disparition justifiée, aucune régularisation de TVA n’est exigée de l’entreprise chez qui la disparition s’est produite.

Il en est de même de la cession d’une immobilisation acquise sous le régime suspensif à un acquéreur qui bénéficie à son tour de l’acquisition sous le régime suspensif (sur présentation d’une autorisation d’achat en suspension de TVA).

Section 4. Crédit de départ des entreprises nouvellement assujetties

§ 1. Droit au crédit de départ

Les entreprises nouvellement assujetties de droit ou par option bénéficient d’un crédit de TVA de départ correspondant à :

- La taxe ayant grevé les biens ne constituant pas des immobilisations corporelles et détenus en stock à la date d’assujettissement : le crédit de départ de TVA pour les éléments en stocks est déterminé à partir des factures d’achat y afférentes. Au cas où le nouvel assujetti se trouve dans l’impossibilité d’identifier le montant de la TVA ayant grevé les produits en stocks sur la base des factures d’achats, il détermine le crédit de départ par application du taux de TVA en vigueur à la date d’assujettissement partant du prix d’achat TTC ;

- La totalité de la taxe ayant grevé les biens constituant des immobilisations corporelles qui n’ont pas encore été utilisées à la date de l’assujettissement ;

- Une partie de la taxe ayant grevé les immobilisations en cours d’utilisation correspondante à la TVA ayant grevé ces biens diminuée de 1/10 par année civile ou fraction d’année civile pour les immeubles et de 1/5 par année civile ou fraction d’année civile pour les autres immobilisations.

Le crédit de départ est déterminé en faisant abstraction de toute provision pour dépréciation éventuelle sur immobilisations ou sur stocks.

Le bénéfice de la déduction couvre la TVA ayant grevé les biens importés ou acquis auprès d’assujettis ou de non assujettis.

Ainsi, le bénéfice du crédit de départ est accordé quelle que soit la source d’approvisionnement c’est-à-dire que les achats aient été réalisés auprès d’assujettis ou non et qu’ils aient été réalisés en régime local ou à l’importation.

§ 2. Obligation de déposer l’inventaire des biens donnant lieu au crédit de départ

L’inventaire des biens précisant les taxes y afférentes constituant le crédit de départ doit être déposé au centre de contrôle des impôts compétent avant la fin du 3ème mois de la date d’assujettissement.

§ 3. Cas du nouvel assujetti partiel

Lorsqu’un nouvel assujetti exerce à la fois une activité soumise à la TVA et une activité non soumise, le crédit de départ est régi par les règles de l’affectation applicables aux assujettis partiels, à savoir :

- pour les stocks de marchandises soumises lors de la vente à la TVA, le crédit de départ est constitué par le montant intégral de la TVA ayant grevé ces marchandises déterminé sur la base du montant réel ou sur la base du taux applicable en vigueur ;

- pour les stocks de marchandises exonérées lors de la revente de la TVA, aucun crédit de TVA ne peut être accordé même si les marchandises ont supporté la TVA à l’achat ;

- pour les immobilisations corporelles amortissables utilisées exclusivement pour les besoins des activités soumises à la TVA, le crédit de TVA est constitué par le montant de la TVA ayant grevé les immobilisations en question, déterminé sur la base du montant réel ou sur la base du taux applicable en vigueur, diminué du dixième par année civile ou fraction d’année civile pour les bâtiments et du cinquième par année civile ou fraction d’année civile pour le reste des immobilisations amortissables ;

- pour les immobilisations corporelles utilisées exclusivement pour les besoins des activités non soumises, il n’est accordé aucun crédit de départ. Il en est de même pour les voitures de tourisme servant au transport de personnes exclues par nature du droit à déduction ;

- pour les immobilisations corporelles utilisées concurremment pour les activités soumises et les activités non soumises, le crédit de TVA est obtenu en appliquant, au montant de la TVA résultant de l’application des règles des fractions du 1/10 et du 1/5, un pourcentage de déduction correspondant au prorata (théorique) de l’exercice précédent si l’on se réfère à la solution retenue par la doctrine administrative lors de l’assujettissement du commerce de détail ayant atteint 100.000 D à la TVA ou à défaut, en appliquant un prorata déterminé sur la base des recettes prévisionnelles de la première année d’assujettissement.

 

 

 

 



([1]) Note commune n° 19, Texte DGI 91/22, page 99 :

«Imputation de la TVA grevant des charges non admises en déduction au titre de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu.

La question s’est posée de savoir si la TVA grevant des charges non admises en déduction en matière d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu, peut être déduite de la TVA due sur le chiffre d’affaires.

À ce propos, il y a lieu de préciser que le droit à déduction, en matière de TVA, est ouvert aux assujettis à la TVA et ne peut donc porter que sur des biens et services à la fois nécessaires à l’exploitation et destinés exclusivement à des opérations taxables ou assimilées et ce, indépendamment du traitement qui leur est réservé en matière d’impôts directs».

([2]) Mais aussi, pour un certain nombre de cas, l’exonération est accordée selon la destination par référence à la qualité de l’acquéreur.