Corrigé de l'étude de cas de fiscalité approfondie

Proposée par Messieurs Slim Besbes et Abderraouf Yaïch

 

 

Première partie

A- Assistance lors du contrôle fiscal de la société ABC

1) a- Prêt sans intérêt : Il s’agit d’un acte anormal de gestion dans la mesure où l’entreprise a renoncé à l’encaissement d’une recette sans justifier un intérêt particulier pour son exploitation.

Par conséquent, le redressement sur ce point est bien fondé en matière d’IS.

b- La TVA étant un impôt réel, elle ne peut être prélevée sur une recette fictive. L’acte anormal de gestion ne peut être invoqué à l’égard de la TVA collectée.

2) a- Les services étant utilisés en Tunisie, la TVA est donc bien exigible. Le fournisseur Italien aurait dû accréditer un représentant domicilié en Tunisie afin d’accomplir les formalités pour le paiement de la TVA.

A défaut, l’administration aurait dû réclamer à la société la TVA à payer, dans la limite de sa dette envers le fournisseur (art. 19 du code de la TVA). Par conséquent, aucune obligation, pour le paiement de la TVA, ne peut être mise à la charge de la société.

b- Les rémunérations au titre de la location d’équipement portuaire au sens de l’article 12 de la convention tuniso-italienne échappe à l’imposition en Tunisie au titre des redevances. Donc aucune retenue à la source n’est exigible.

3) Les inspecteurs ont bien observé le principe de l’annualité de l’impôt. Néanmoins, ils n’ont pas appliqué le principe de la correction symétrique qui consiste à ramener les charges à leurs exercices d’origine.

Conséquence pratique : La charge de 1994 comptabilisée en 1995 devait être rattachée à l’exercice 1994. Or cet exercice 1994 est bien prescrit, donc il y a perte définitive des montants correspondants.

4) La doctrine administrative dissocie entre l’ordre de calcul du seuil du dégrèvement et l’ordre d’imputation du dégrèvement qui passe par la déduction prise en priorité des dégrèvements sans minimum d’impôt et suivi par le dégrèvement soumis à cet impôt minimum. L’application de cette doctrine donne l’ordre du calcul suivant :

 

Bénéfice après export 600.000 D
Dégrèvement physique 35% 210.000 D
Reliquat 390.000 D
Dégrèvement sans minimum d'impôt 300.000 D
Reliquat 90.000 D
Impôt minimum : (600.000 D - 300.000 D) x 15% 45.000 D

 

Conclusion : La proposition du redressement n’est pas fondée.

2- L’article 11 de la loi n° 88-108 du 18 août 1988 interdit aux experts-comptables d’assumer toute mission de représentation devant les tribunaux de l’ordre judiciaire ou administratif ainsi qu’auprès des administrations ou des organismes publics. Toutefois, l’expert-comptable peut exercer la mission d’assistance en présence de son client.

3- La procédure se décompose en deux phases :

1) La phase administrative

- La réponse à la notification du redressement doit intervenir dans le délai de 10 jours à partir du 25 novembre 1998. La société doit formuler toutes observations et discussions visant à contester les résultats du redressement.

- En cas de désaccord persistent, le dossier est transmis à la commission de conciliation qui étudie le dossier et convoque les parties afin d’arriver à une solution à l’amiable du litige.

- La commission de conciliation notifie à la société un rapport à charge d’y répondre dans un délai de 20 jours.

- La commission de conciliation émet un avis sur la solution du litige qui lie l’administration et sur la base duquel cette dernière établit un arrêté de taxation d’office.

2) La phase contentieuse

a- Appel devant la commission spéciale de taxation d’office (CST)

La société peut interjeter appel à l’arrêté de taxation d’office devant la CST dans un délai de 30 jours à partir de la réception de la notification dudit arrêté. Pour que cet appel soit recevable, il doit être motivé. A noter qu’en matière de retenue à la source, l’appel n’est pas suspensif d’exécution.

b- Pourvoi en cassation devant le tribunal administratif (TA)

Ce pourvoi n’est pas suspensif d'exécution et doit être effectué dans un délai de 30 jours à partir de la date de la notification de la décision de la CST. La requête en cassation doit être introduite par un avocat à la cour de cassation.

4- L’administration soutient que la prescription au titre des impôts directs s’étend sur quatre années plus l’année en cours. Néanmoins, la jurisprudence du TA retient que la prescription ne peut s’étendre sur plus de quatre années y compris l’année en cours.

La prescription en matière de la TVA ne fait pas l’objet d’un litige : l’année en cours plus trois années.

En revanche, certains considèrent que la prescription de la TVA n'est pas interrompue par l'arrêté de taxation d'office. En effet, l'article 21 du code de la TVA qui régit la matière ne renvoit qu'à l'alinéa 3 de l'article 72 du code de l'IRPP et de l'IS. Or c'est l'alinéa 2 de l'article 72 du code de l'IRPP et de l'IS qui édicte la règle selon laquelle l'arrêté de taxation d'office interrompt la prescription.

Dans ce sens, la prescription continue à courir au regard de la TVA jusqu'à la date du prononcé de la décision de la CST.

B- Redressement fiscal du PDG.

1) Le compte courant débiteur constitue une avance qualifiée par l’article 30 du code de l’IRPP et de l’IS comme distribution officieuse passible de l’impôt entre les mains du bénéficiaire, sauf preuve contraire (s’agissant d’une présomption simple). Ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Donc le redressement est justifié.

Etant signalé qu’aucune régularisation ne peut avoir lieu après intervention du contrôle.

2) Lors du remboursement de l’avance par le PDG à la société, la fraction des impositions auxquelles leur attribution avait donné lieu est imputée sur l’impôt dû au titre de l’année du remboursement ou des années suivantes (art. 30 du code de l’IRPP et de l’IS). Néanmoins, les sommes relatives aux pénalités sont perdues définitivement.

C- Consultation sur certaines difficultés fiscales.

1) La résiliation étant intervenue après trois jours (délai de rétraction), elle constitue une nouvelle mutation passible des droits proportionnels. Cependant, on peut éviter de payer un nouveau droit proportionnel par le recours à la résolution judiciaire de la mutation. En outre, si cette résolution judiciaire est motivée par la lésion ou le vice caché, la partie peut demander la restitution des premiers droits après que le jugement acquiert l’autorité de la chose jugée (ou après l’intervention d’un jugement définitif).

Par ailleurs, le problème de la plus-value immobilière et du sort de la retenue à la source de 2,5% à ce titre se pose. Cette imposition est restituable sur demande de l'intéressé en cas de résiliation judiciaire.

2) a- Intérêt de l’option pour les produits exonérés et exportés

Depuis le 1er janvier 1999, l’option pour l’assujettissement à la TVA peut être simplement partielle. Elle présente les avantages suivants :

- Ouverture du droit à déduction de la TVA sur les achats.

- Amélioration du prorata pour les secteurs communs.

- Exonération de la TVA au niveau des ventes à l’exportation, avec possibilité de restitution immédiate du crédit de TVA.

- Possibilité d’achat en suspension de TVA dans le cadre de l’article 11 du code de la TVA.

- Meilleure compétitivité internationale des produits tunisiens.

b- Intérêt de l’option pour les produits exonérés vendus localement

Avantages :

- Déduction sur les achats.

- Amélioration du prorata.

- Meilleure compétitivité pour une chaîne d’assujettis (en amont et en aval).

Précaution :

Si la chaîne est rompue, l’option devient pénalisante.

Inconvénients :

Coût administratif plus élevé dû à la complexité de la mise en œuvre de l’option partielle.

Deuxième partie

1) Revenu net imposable 30.000 D

A déduire : Revenu d’activité de soutien

30.000 D

Base imposable

0

Calcul du minimum d’impôt

Revenu global imposable

30.000 D

Parents à charge

300 D

Revenu net imposable 29.700 D

Calcul selon le barème

20.000 D x 20,12%

 4.024 D

9.700 D x 30%

2.910 D

IR dû

6.934 D
Minimum d’impôt : 6.934 D x 30% 2.080,200 D

 

2)

Revenu BPNC 80.000 D
Revenu foncier 40.000 D x 70% 28.000 D
Revenu global 108.000 D
Déduction au titre de l’activité de soutien 80.000 D
Revenu net imposable 28.000 D

 

Impôt dû sur une base de

 

28.000 D

- jusqu'à 20.000 D 4.024 D
- 8.000 D x 30% 2.400 D
Total dû 6.424 D

 

IR dû sur une base de

 

108.000 D

Jusqu'à 50.000 D 13.025 D
58.000 D x 35% 20.300 D
Total dû 33.325 D

 

Minimum d’IR : 33.325 D x 30% = 9.997,500 D ;

C’est le minimum d’IR qui est dû.

 

 

3) La déclaration de l'analyste médical était à déposer le 25 mai, il sera en mesure de procéder au réinvestissement jusqu’à cette date.

 

Revenu imposable 100.000 D
Dégrèvement financier sans minimum d'impôt 60.000 D
Reliquat 40.000 D

Déduction du revenu au titre  de l’activité de soutien (limitée à 40.000 D)

40.000 D
Revenu net imposable 0
Minimum d’IR :
IR :

10.024 D

Minimum IR : 10.024 D x 30% = 3.007,200 D

C’est le minimum d’IR qui est dû.

 

Troisième partie

1) Les aspects fiscaux de l’opération :

a- au regard de l’impôt direct :

L’opération de formation qui consiste à communiquer pour une partie, des connaissances usuelles de sa profession à une autre partie, notamment par la mise à disposition de personnel spécialisé dans un domaine déterminé, répond bien à la définition de la notion d’assistance technique. Par conséquent, les rémunérations versées à ce titre par la société ABC au profit du bureau d’études italien ont le caractère de redevances, dont le régime fiscal est régi par l’article 12 de la convention fiscale Tuniso-Italienne. Cet article exclut les rémunérations payées au titre de l’assistance technique de l’impôt sur les redevances. Donc, les rémunérations versées par la société ABC au profit du bureau d’études Italien ne supportent aucune retenue à la source.

b- au regard de la TVA :

L’opération de formation, quel que soit le lieu de son déroulement, est une prestation destinée à être consommée en Tunisie puisque le destinataire, qui est la société ABC, est établie en Tunisie. Donc, en vertu de l’article 3 du code de la TVA, l’opération de formation est réputée faite en Tunisie et rentre donc dans le champ d’application de la TVA. Le bureau d’études Italien doit facturer la TVA à la société ABC selon les conditions suivantes :

Base de la TVA : la rémunération brute y compris la prise en charge des frais : 50.000 D + 20.000 D = 70.000 D.

Taux de la TVA : 18%

Liquidation : 70.000 D x 18% = 12.600 D

Le bureau d’études doit accréditer un représentant domicilié en Tunisie pour accomplir les formalités en matière de TVA. A défaut, l’administration peut réclamer la TVA à la société ABC dans la limite de sa dette envers le bureau d’études (Art. 19 du code de la TVA).

Si la société ABC est une entreprise publique, elle est tenue d’opérer une retenue à la source sur la TVA qui lui est facturée. La retenue à la source sur TVA est égale à : 12.600 D x 50% = 6.300 D

c- au regard des droits d’enregistrement :

Le contrat de formation doit être enregistré au droit fixe applicable sur les marchés : 10 D par page.

2) Régime fiscal applicable aux formateurs du bureau d’études Italien :

Les formateurs sont détachés en Tunisie pour une mission temporaire. En application de l’article 15 de la convention Tuniso-Italienne, ces formateurs échappent à l’imposition en Tunisie dès lors qu’ils répondent aux trois conditions cumulatives posées par le même article 15, à savoir :

- La période de séjour en Tunisie n’excède pas 183 jours ou 6 mois durant l’année 1999, et

- Les rémunérations de ces formateurs sont payées par le bureau d’études Italien qui n’est pas établi en Tunisie, et

- Ces rémunérations ne sont pas prises en charge par un établissement stable ou une base fixe que le bureau d’études a en Tunisie.

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